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Une interview de la directrice de l’Unesco en Équateur

 

Pour en savoir plus sur le rôle de la prestigieuse organisation internationale dans la sauvegarde du patrimoine équatorien, nous avons rencontré Madame Saadia Sánchez Vegas, directrice du bureau de l’Unesco à Quito chargé de l’Équateur, la Colombie, le Venezuela et la Bolivie.

Bien qu’il y ait eu des progrès pour le financement de projets dirigés pour la protection et la sauvegarde du patrimoine culturel, une action urgente demeure nécessaire pour mobiliser, réorienter et libérer la puissance transformatrice des ressources privées.

 

Quel est le rôle de l’Unesco dans la gestion des sites équatoriens figurant sur la liste du patrimoine mondial ?

Saadia Sánchez Vegas : L’Unesco a apporté et continue d’apporter une aide technique spécialisée aux États membres, sur des thèmes liés à la protection du patrimoine culturel matériel, à la sauvegarde du patrimoine immatériel ainsi qu’à la protection et la promotion des industries créatives et culturelles. Parmi les travaux développés par l’organisation émanent notamment des actions liées à la protection des sites inscrits sur la liste du patrimoine mondial, dont la Valeur Universelle Exceptionnelle (VUE) transcende par définition les frontières nationales et se doit d’être préservée par les générations présentes et transmise aux générations futures.

Avec son bureau à Quito, l’Unesco a réalisé ces dernières années, en collaboration avec les autorités nationales et locales, un large éventail d’actions, comme récemment l’élaboration d’un plan de gestion pour le complexe conventuel de Saint- François, l’un des monuments qui contribuent à exprimer la Valeur Universelle Exceptionnelle de la ville de Quito, inscrite sur la liste du patrimoine mondial depuis 1978. Le bureau y a notamment dirigé la restauration de la vieille brasserie, la cour orientale du musée « Fray Pedro Gocial » et la fontaine du cloître principal du couvent. Parallèlement, l’Unesco a accompagné la mairie de Quito dans l’élaboration d’un outil technique qui permettra de réduire les risques auxquels sont exposés les biens patrimoniaux situés dans le cœur historique classé par le patrimoine mondial. En outre, l’Unesco a mis en œuvre des actions d’accompagnement technique et de formation de capacités pour accompagner l’Équateur dans la mise en place de la Convention de 2001, relative à la protection du patrimoine culturel subaquatique, et de la Convention de 2003 au sujet de la sauvegarde du patrimoine culturel Immatériel, avec une attention particulière à la technique du tissage traditionnel du « paja toquilla » (NDLR la base de fabrication du chapeau Panama).

Concernant les Galápagos, quelle est la contribution complémentaire de l’Unesco dans la gestion de l’archipel, considérant qu’il s’agit déjà d’un parc national dirigé par une mission scientifique internationale ?

S.S.V : Depuis 1978, année d’inscription des îles Galápagos sur la liste du patrimoine mondial, l’Unesco a accompagné durablement tant le gouvernement national que les autorités locales dans la gestion du site, afin de garantir sa protection dans le temps. Il se limite au périmètre du « parc national des Galápagos », créé par décret du 4 juillet 1959, soit 7 970 km² pour la partie terrestre, et de la « réserve marine des Galápagos » créée en 1998 (133 000 km²). L’aire du parc national est gérée, de même que toutes celles qui intègrent le « programme national des aires protégées », par le Ministère de l’Environnement, via la direction du parc national des Galápagos. Afin de contribuer à la protection et la transmission de la « Valeur Universelle Exceptionnelle » du site, l’Unesco a en diverses occasions, avec l’aide du comité du patrimoine mondial, approuvé les demandes d’assistance internationale réalisées par l’État membre, octroyant d’importants moyens pour la mise en œuvre de projets de conservation ainsi que le traitement de situations d’urgence. De plus, il convient de souligner que l’inscription du site sur la liste du patrimoine mondial a contribué d’un côté à la création d’une conscience et d’un sentiment de responsabilité entre les organismes étatiques et de la société civile sur l’importance de protéger sa valeur unique et irremplaçable. Alors que d’un autre côté, cela a encouragé la création de réseaux ainsi que l’échange de bonnes pratiques au niveau international avec d’autres institutions chargées de la gestion de sites similaires inscrits sur la liste du patrimoine mondial. Il est également important de mentionner que l’archipel a été le siège, en 2016, de la conférence globale des patrimoines marins, qui a réuni des experts du monde entier et des représentants des sites marins inscrits sur la liste du patrimoine mondial.

La ville de Quito a célébré en 2018 les 40 ans de son inscription sur la liste du patrimoine mondial et fut alors la première ville, avec Cracovie, à bénéficier de ce statut. En quatre décennies, peut-on considérer que l’intervention de l’Unesco dans la conservation et la gestion du patrimoine historique de la ville est une réussite ?

S.S.V : Tout à fait. Il est important de souligner que le bureau de l’Unesco de Quito, que j’ai l’honneur de diriger, a mené une méticuleuse reconstitution du processus d’élaboration du dossier de candidature pour l’inscription de la ville de Quito sur la liste du patrimoine mondial dans les années 70, permettant de découvrir que le certificat d’inscription original n’avait jamais été enregistré dans les archives de la ville. Les démarches du bureau de Quito ont alors permis d’obtenir une copie officielle du certificat d’inscription signé par l’actuelle directrice générale de l’Unesco, Madame Audrey Azoulay, lequel a été remis aux autorités municipales. Il est aujourd’hui exposé dans le hall de la mairie, afin qu’il soit porté à la connaissance des citoyens et visiteurs. De manière générale, l’Unesco a énormément contribué à la préservation du patrimoine culturel de l’Équateur, mettant en œuvre diverses actions de conservation, de préservation, de gestion et de sensibilisation sur l’importance de protéger et transmettre la Valeur Universelle Exceptionnelle des biens du patrimoine mondial de l’Équateur, en accompagnant le pays dans les travaux impliquant la ratification de la Convention de 1972 pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel.

Aujourd’hui, l’Unesco a-t-elle toujours le pouvoir financier de soutenir ses projets de conservation du patrimoine mondial en Équateur ? Ou bien nécessite-elle de l’aide du secteur privé, en particulier celui du tourisme ?

S.S.V : L’Unesco a offert et continuera d’offrir fièrement son soutien technique aux organismes publics du secteur culturel et patrimonial ainsi qu’aux autorités autonomes décentralisées, en conformité avec les priorités identifiées aux niveaux national et local. Ainsi, l’Unesco a réussi au fil du temps à mobiliser des moyens extrabudgétaires afin d’accompagner l’Équateur, ainsi que les trois autres pays sous la responsabilité du bureau de Quito, dans la mise en place des conventions culturelles ratifiées par les pays. De ce fait, l’organisation a contribué à la protection, la conservation, la promotion et la transmission de la culture et du patrimoine tout en développant la créativité et la diversité des expressions culturelles et la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel pour le dialogue et le développement durable. Cependant, face aux défis grandissants que rencontre actuellement la protection et la sauvegarde des biens et manifestations du patrimoine culturel (matériel et immatériel) et naturel, la nécessité de construire des alliances entre les organismes publics et privés, la société civile et la coopération internationale, s’est transformée en un objectif stratégique clé. Ainsi, comme cela est soulevé dans « l’agenda 2030 pour le développement durable », par le biais de « l’objectif de développement durable 17 », ces alliances construites sur des principes, des valeurs, des visions et des objectifs communs sont nécessaires à tous les niveaux et dans tous les secteurs. Bien qu’il y ait eu des progrès au sein des alliances pour le financement de projets dirigés pour la protection et la sauvegarde du patrimoine culturel, une action urgente demeure nécessaire pour mobiliser, réorienter et libérer la puissance transformatrice des ressources privées.

Parmi les cinq sites équatoriens inscrits sur la liste du patrimoine mondial, certains sont-ils considérés « en péril » ?

S.S.V : Dans le cadre de la Convention de 1972 pour la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel a été créée la « liste du patrimoine mondial en péril », avec pour objectif d’informer la communauté internationale des conditions qui menacent les caractéristiques pour lesquelles un bien déterminé a été inscrit sur la liste. En encourageant la communion des efforts au niveau mondial et en permettant de mobiliser les moyens (humains et financiers) pour répondre aux exigences de conservation du bien. L’inscription d’un bien sur la liste du patrimoine mondial en péril permet au comité du patrimoine mondial de procurer aux États membres une assistance immédiate via le fond du patrimoine mondial, ainsi que le déploiement et le contrôle des mesures correctives adéquates, pour protéger sa Valeur Universelle Exceptionnelle de façon tangible et efficace. Cette inscription d’un bien sur la liste du patrimoine mondial en danger n’est pas perçue de manière analogue par tous les États membres de la convention. D’un côté, certains pays vont l’inscrire afin d’attirer l’attention de la communauté internationale vis-à-vis des problèmes qui les affectent, ceci dans l’optique d’obtenir l’assistance d’experts qui contribueront à les résoudre. D’un autre côté, des pays préfèrent éviter cette inscription, laquelle est perçue comme un opprobre. Il est important de préciser que l’inscription d’un bien sur cette liste ne doit aucunement être considérée comme une sanction, mais plutôt comme une méthode permettant d’appréhender des problèmes et des nécessités de conservation spécifiques. Actuellement, aucun bien du patrimoine mondial équatorien n’est inscrit sur cette liste. Soulignons que les îles Galápagos avaient été inscrites sur la liste du patrimoine mondial en péril en 2007, lorsque le gouvernement de l’Équateur déclara, par décret présidentiel, que la conservation de l’écosystème de l’archipel était en danger. Suite à cette inscription et les mesures correctives mises en place avec le soutien de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN), un des organes consultatifs de la Convention de 1972, et le centre du patrimoine mondial de l’Unesco, le comité du patrimoine mondial a reconnu les réussites obtenues en faveur de la protection du site et, en 2010, a décidé de le retirer de la liste du patrimoine mondial en péril.

 

Traduction : Damien Algeo – Bernard Bonnet, Les Maisons du Voyage

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